devoir de mémoire

10/11/2010 22:18 par atouteurre

DEVOIR DE MEMOIRE

L’obligation morale de témoigner d’ évènements passés, dont la connaissance et la transmission sont jugés nécessaires pour tirer les leçons du passé, se traduit généralement par des cérémonies commémoratives, des écrits, des représentations.

Le 11 novembre est un de ces jours où le souvenir des trop nombreux disparus doit raviver la flamme de la mémoire collective.

Transmettre aux jeunes générations le respect dû aux anciens, ces « poilus », morts pour la France, doit inciter chaque parent à encourager son enfant à assister aux cérémonies commémoratives. C’est pourquoi, le nombre grandissant d’enfants des classe CM1 et CM2 qui assistent à la cérémonie du 11 novembre, ne peut-être qu’encourageant à persévérer dans cette lutte contre l’oubli.

L’illustration du diplôme d’honneur, visible à la mairie, où sont inscrits les nombreux noms des« Mort pour la France » de la commune d’EURRE , montre une dame éplorée de chagrin, épuisée des souffrances endurées par la disparition qui d’un mari, qui d’un fils qui d’un père.

L’illustration montre aussi un de ces valeureux soldats compagnon d’arme des  1 357 800 morts pour la Patrie, un des survivants, un des revenus de la Grande Guerre « la der des der ».

Cette association des proches avec les disparus nous incite à ne pas les ignorer et c’est pourquoi cette année, un poème de Georges DUHAMEL , médecin et chirurgien dans la guerre, a été lu . « La ballade de Florentin PRUNIER » fait partie des Elégies, une oeuvres de G.Duhamel, parue aux éditions Mercure de France. Il a été trouvé dans un livre d’école « LA RECITATION FRANCAISE au cours moyen et au cours de fin d’études primaires certificat d’études » de A. SOUCHE chez FERNAND NATHAN daté de 1957

C’est en mémoire de ces enfants de la commune que je publie la liste des anciens combattants 14-18, précieusement conservée dans les archives familiales d’Aimée MORIN ;

 

Voici la liste des 51 anciens combattants de la Guerre 14-18 telle qu’elle figurait dans un cahier de Monsieur MORIN Henri, alors président de l’amicale des anciens combattants d’Eurre en 1953.

ARMAND Daniel

ARNAUD Adrien

BREYTON Paul  

BRUNET Marius

BAUDOUIN Louis

BOISSY Firmin

BONNET Alfred

BOUCHET Julien

BOUILLOUX Firmin

CHIRON Daniel

CHIRON Léon

COTTE Emmanuel

COMBE Marius

DEMORTIERE Léon

DUPRE Achille

DIDIER Paul

DUCROS Emile

FOGERON Léon

FOGERON Elie

FRANCON Elie

FRAUD Adrien 

FERMO N Joseph

GRESSE Henri

GRANGEON Julien

GUILLERMET Henri

HUGON Louis 

JARDIN Léon

JOURDAN Henri

JULIEN Casimir 

JOUVE

LABROUSSE Charles

LANTHAUME Elie

MAILLET Julien

MOREL Hermening

MORIN Henri

MONCHAL Charles

MONIER Marius

MONIER Louis

MOLARD Victor

MAZARD Marius

PRALY Léon

PIGEON Clément

PERMINGEAT M

PION Louis

ROSTAING Paul

RENIER Gabriel

REY Camille

TARDIEU Léopold

VINCENT Aimé

VALETTE Françis

AVENAS

 

 

 

11 novembre 2009

10/11/2010 21:45 par atouteurre

Les enfants se souviendront !

Un peu avant les vacances de la Toussaint, deux jeunes adolescents, d’une classe de troisième au collège Saint Louis de Crest et en quête de renseignements sur le monument « aux morts » de notre commune, sont venus frapper à ma porte. Ces deux jeunes eurrois, Loriane et Mathieu, accompagnés de leur maman, espéraient obtenir des réponses au questionnaire donné par leur professeur. Justement, sur la table de ma salle à manger, se trouvait toute la documentation nécessaire à mon intervention du 11 novembre 2009. Je leur indiquais , en me référant au n°14 du bulletin municipal de décembre 2001, les éléments de réponse nécessaires à leur devoir. ..Sauf une, car le nom de l’architecte ayant construit notre monument ne figure, ni dans les archives des délibérations communales, ni dans la presse locale, ni au creux d’une pierre le constituant.

Puis, comme tout passionné, je leur expliquais le sens de mes recherches, mes méthodes pour trouver ce que je cherche, ainsi que le but de mon travail de mémoire en honneur à ceux qui ont donné leur vie pour notre patrie et nos libertés de 1914 à 1918.

HONNEUR aux « MORT POUR LA FRANCE », honneur aux 31 « poilus » de notre commune dont la vie s’est arrêté pour les plus jeunes à 19 ans et demi et pour le plus ancien à 43 ans. HONNEUR aussi à ceux qui en sont revenu et qui, de nombreuses années encore après, se remémoraient l’enfer vécu ou ont souffert, parfois jusqu’à leur dernier jour, des séquelles des horribles blessures reçues pendant les rudes combats qu’ils ont du mener.

11 novembre 2009… les enfants se souviendront !

Heureuse surprise… Les deux collégiens étaient présents le 11 novembre au monument aux morts de la commune et avec eux d’autres enfants assistaient aussi à la cérémonie commémorative de l’armistice du 11 novembre 1918. Depuis quelques années, des enfants assistent aux cérémonies commémoratives. Leur nombre varie, mais se compte facilement.

Il serait bon que l’exemple vienne des parents !

Une heure donnée à se souvenir, une heure dans notre monde actuel, c’est peu en regard des 37488 endurées au fond d’une tranchée sous un bombardement quasi omniprésent.

 

INTERDICTION D'ENSEIGNER EN 1811

11/09/2010 10:04 par atouteurre

 

Un arrêté portant interdiction d’enseigner

 

 

 

Le 14 août 1811, le maire M. MOREL est amené à prendre un arrêté afin d’interdire au sieur Jean Joseph BERTRAND d’enseigner sur le territoire de la commune. Cet étranger (il est de Briançon) porte atteinte à la propriété de l’instituteur en titre, M. Paul DOURILLE, légalement installé instituteur depuis plusieurs années. Les parents  et les personnes qui l’hébergent ou lui donnent asile pour faire l’école sont aussi concernés par cette interdiction. Le garde champêtre doit informer les différents protagonistes et  notifier sur le registre des arrêtés la remise de celui-ci au sieur BERTRAND.

Voici la transcription de cet arrêté, sa forme, son style et l’orthographe étant respecté. ( Archives de la commune d’Eurre).

 

Le maire d’Eurre vu les lettres à nous adressées par Mr le Sous Préfet de l’arrondissement de Die du 16 janvier dernier et 6 du courant mois relatives aux mesures à prendre pour empêcher le Sieur Jean Joseph Bertrand  Briançonneux de tenir école dans cette commune où il s’est établi comme instituteur depuis environ huit mois.

 

Considérant que si la voie de fait que s ‘est permis le sieur Bertrand étranger d’ailleurs à cette commune d’ouvrir une école où il reçoit journellement beaucoup d’enfants étoit du longtemps toléré ce seroit autoriser une infraction formelle aux loix et règlement sur l’instruction publique.

 

Considérant que le Sieur Paul Dourille à été nommé légalement par nous et le conseil minicipal depuis plusieurs années pour remplir les fonctions d’instituteur de l’école primaire d’Eurre après avoir subi l’examen exigé par les réglements de son excellence le Grand Maitre de l’université, et que le sieur Dourille est en position de cette place et que la voie de fait du sieur Bertrand est un attentat à la propriété dudit Dourille arrête

 

Article 1er

 

Il est exprecement defendu au sieur Jean Joseph Bertrand de continuer à recevoir des enfants en sa qualité d’instituteur, et de leur apprendre à lire, à écrire ny instruire dans aucun genre et lui est enjoint de cesser toute fonction d’instituteur dans le délai de vingt quatre heure à dater de la signification officielle qui lui sera faites de notre arrêté

 

Article 2

 

Il est défendu aux pères, mères et tuteurs des enfants de les laisser aller ou conduire chez ledit Bertrand

 

Article 3

 

Il est défendu aux sieurs Etienne paturel et antoine faure dit coste et à tous autres citoyens de cette commune de preter logement «et azile audit Bertrand pour recevoir des enfants et former par là une école.

 

Article 4

 

Les denommés au présent qui contreviendront aux défenses exprimés par les articles précedant seront poursuivit conformément aux loix et reglement soit en police municipale soit devant le tribunal de police de Mr le juge de paix, le présent arrêté sera affiché pendant quinzaine à la porte de l’église parroissiale d’Eurre et à la porte de la maison commune, lu et publié pendant deux dimanche ou fettes de suitte afin que personne n’en puisse prétendre cause d’ignorence il sera de plus notifié par extrait en forme audit Jean Joseph Bertrand par la voie du garde champêtre qui en fera mention sur notre registre Comme aussi les sieurs paturel et faure coste seront invités par nous à venir prendre connaissance de notre arrêté pour sy conformer, fait en maison commune d’Eurre le quatorze aout mil huit cent onze.

 

Morel maire 

 

Je soussigné françois Bellier garde

Champêtre de la commune d’Eurre

Certifie avoir remis l’extrait en forme

De l’arrêté cy dessus audit Jean Joseph

Bertrand trouvé chez le sieur Etienne

Paturel au terroir d’Eurre le quatorze

Aout mil huit cent onze après midi

 

 

 

Pierre André VINET ... L'insurgé de Eurre

04/08/2010 20:08 par atouteurre

  • Pierre André VINET ... L'insurgé de Eurre

    Pierre André VINET ... L'insurgé de Eurre

    04/08/2010 20:08 par atouteurre

Acte de décès de P.A.VINET le 17 janvier 1874 à Eurre. Scan de Jean Michel LEROUX - 2010

 

  • L'insurgé Pierre André VINET est décédé à 73 ans le 17 janvier 1874 à Eurre. Il est noté ex agent voyer.
  • Son épouse, Joséphine RAMBAUD, est décédée le 15 mars 1881 à Eurre. Adrien, chef cantonnier, déclara leurs décès.
  • Leurs fils, Adrien et Léon Paul quittent le village .
  • Le 22 mai 1882, la préfecture de Valence envoie le titre de rente n° 223 aux victimes de 1851. Adrien est présumé habiter Suze sur Crest par le maire COMBE et le 17 novembre 1882, même envoi des brevets de pension où il est mentionné qu'il habite à Marseille, 52 rue d'Aubagne. (AD M 1354, 2ème partie).
  • Adrien VINET s'est marié à Autichamp (26) avec Marie Virginie Pauline  LIOTARD  le 12 mai 1869. Veuf le 27 janvier 1886, il se remarie avec Anne Elisabeth TOURNIER et décède le 6 mars 1892 à Cruas ( 07) à l'âge de 49 ans ; il était alors cultivateur.
  • Emilie VINET, née le 17 juin 1870 à Eurre et petite fille de Pierre André, s'est mariée le 30 octobre 1904 à Bollène (26) avec André LAYE. Elle y décède le 13 septembre 1912 et est enterrée à Eurre dans le caveau familial.

Pierre André VINET

04/08/2010 19:31 par atouteurre

  • Pierre André VINET

    Pierre André VINET

    04/08/2010 19:31 par atouteurre

Fiche de renseignements concernant l'insurgé Pierre André VINET. (AD M1354) . scan Jean Michel LEROUX -2010

 

Le Préfet de la Drôme, FERLAY, envoie aux maires, une demande de renseignements concernant les insurgés. Monsieur BARRET , le maire de Eurre inscrit, le 5 décembre 1852, sur la fiche de P.A.VINET

"...et laisse parler la haine contre les hommes d'ordre d'une manière regrettable... le sieur VINET bien loin de rendre plus facile mon administration comme il l'avait promis, a, si j'en juge par la nouvelle rupture entre les esprits qui semblaient tendre vers l'union, rien fait de moins que le contraire."

Dans le "Livre d'or des victimes du coup d'état de 1851 et de la loi de sureté générale de 1858" le relevé exact des registres de la commission mixte du département de la Drôme parut en 1883 il est dit de Pierre André VINET : Chef et organisateur très influent et très dangereux des sociétés secrètes - Dix ans d'Afrique.

Pierre André VINET...L'insurgé de Eurre

04/08/2010 18:58 par atouteurre

  • Pierre André VINET...L'insurgé de Eurre

    Pierre André VINET...L'insurgé de Eurre

    04/08/2010 18:58 par atouteurre

P.A.VINET accepte la grâce présidentielle.  ( AD  M1371/4 dossier 446) scan : Jean Michel LEROUX - 2010

 

Espoir et déchéance

Gracié le 15 août 1852 par l'empereur Louis Napoléon, il est mis en liberté sous surveillance de la police générale.

" Il était aussi dévoué à l'Empereur que possible. La clémence de Louis Napoléon l'a transformé."

Dans une lettre datée du 3 septembre et adressée à monsieur BONARDON de Crest, il relate sa visite chez le Préfet et chez le recteur afin d'être réintégré comme instituteur. Il dit combien lui pèse les mesures de surveillance dont il fait l'objet. Il lui demande de le tirer d'affaire (il lui doit déjà sa grâce).

"... voilà monsieur BONARDON la douceur avec lequel je suis traité par monsieur le maire."

"... ses amis ont eu des torts aux éléctions mais s'en repentent, c'est de la faute à monsieur BARRET."

Le 18 octobre 1852, il accepte avec reconnaissance la grâce présidentielle.

Pierre André VINET ne sera pas réintégré comme instituteur.

 Le vote des 21 et 22 novembre 1852 ne fait l'objet d'aucune mention sur le registre des délibérations du conseil municipal tout comme la période pourtant si trouble allant du 1er avril 1851 au 22 février 1852. Sur Eurre, celui-ci a donné les résultats suivant : votants 260 ; oui 252 ; non 7 ; bulletin blanc  1(peut-être celui de notre insurgé). (AD M47)

Plus tard, Robert SERRE écrit page 318 de son ouvrage déjà cité *:

" M. le Maire voulant donner plus de solennité à l'avènement de l'élu de la nation [annonça] qu'il y aurait un banquet à la mairie[...] tous les membres du conseil municipal s'y sont refusés parce que ces hommes avaient déjà organisé le leur avec toute la démagogie de la commune. Enfin, vers une heure après midi, M. le Maire, le garde champêtre et l'instituteur étaient réunis dans la salle de la mairie, assistés de tous les gens d'ordre de la commune au nombre de trente [...] chacun s'applaudissait de s'être réunis ainsi pour fêter l'élu de la nation, le sauveur de la France [...] La démagogie était toute réunie en banquet chez le sieur Arcullier [?] cabaretier, là étaient tous les membres du conseil municipal et autre tel que Vinet ex-instituteur, des étrangers de Vaunaveys, de la Rochette et d'Allex. Mr Duvaure adjoint ceint de son écharpe présidait ce banquet au nombre de cinquante..."

* Robert Serre, 1851 : Dix mille Drômois se révoltent, l’insurrection pour la République démocratique et sociale, 400 pages, éd. Peuple Libre / Notre Temps, novembre 2003.

Notes de l'auteur : Monsieur BONNARDON, avec deux N, Pierre Raymond est né à Vizille (38) le 11 février 1817, il est le fils de Antoine Basile BONNARDON, chirurgien de la Grande Armée puis docteur en médecine de Vizille, et de Marie Claire Joséphine DOU originaire de Tallard (05) et décédée le 20 octobre 1836 à Vizille. Il a un frère qui est Conseiller Général de l'Isère et une soeur. Alors qu'il est premier commis de la Direction de l'Enregistrement et des Domaines du département de la Drôme, il épouse le 19 novembre 1846 à Valence la fille du maire de cette ville, monsieur FERLAY Joseph Antoine, futur préfet de la Drôme. Son épouse  Marie Eléonore Mélanie FERLAY est née le 28 avril 1827 à Valence dont la mère Marie Eléonore BADON décèdera à Valence le 9 mars 1874.

Pierre Raymond BONNARDON décèdera à Vienne en juin 1893 et sera inhumé à Valence.

Joseph Antoine FERLAY, préfet de la Drôme, né le 23 mai 1798 à Tersanne (26) décèdera à Valence le 9 mars 1884.

ref : acte de mariage du 19 novembre 1846 : Archives numérisées de la Drôme et Généanet généalogies René Dreveton et Didier Beaume.

Pierre André VINET

04/08/2010 17:53 par atouteurre

  • Pierre André VINET

    Pierre André VINET

    04/08/2010 17:53 par atouteurre

Mandat d'arrêt du 1er février 1852. (archives départementales M1371/4 dossier 446). scan : Jean Michel LEROUX - 2010

Pierre André VINET

04/08/2010 17:45 par atouteurre

  • Pierre André VINET

    Pierre André VINET

    04/08/2010 17:45 par atouteurre

Acte de naissance de Pierre André VINET; scan : Jean Michel LEROUX - 2010

l'école de Fabien DIDIER en 1852

04/08/2010 16:50 par atouteurre

Les tribulations d’un instituteur à Eurre,

peu après le coup d’état de 1851

sur communication de monsieur Georges PETIT du récit concernant son ancêtre Fabien DIDIER, instituteur à Eurre dans une période difficile pour la commune, puisque vécue peu après les évènements des insurgés de 1851.

Fabien DIDIER est né en 1827 dans un petit village du Diois, Chamaloc. Après avoir suivi les cours de l’Ecole Normale de Grenoble, il est instituteur à Saint-Agnan-en-Vercors, puis nommé à Eurre en 1852. A cette époque une partie du traitement des instituteurs dépendait du nombre d’élèves fréquentant effectivement l’école…

« … Je partis de Saint Agnan le 6 février 1852 et ouvris ma classe à Eurre le 9. On m’avait nommé là pour remplacer M. VINET, excellent instituteur qui, au coup d’état de décembre 1851 fut enfermé à la Tour de Crest, et plus tard condamné à dix ans de bannissement en Algérie, pour sa participation comme chef politique d’Eurre et des communes environnantes à la résistance contre le nouvel ordre des choses.

L’école était donc fermée depuis deux mois. Le jour de mon arrivée, qui se trouvait un dimanche, bon nombre de pères de famille vinrent me voir à l’hôtel ARCULIER où j’avais pris une chambre provisoirement. Tous me témoignèrent beaucoup de sympathie, tout en déclarant formellement, qu’attachés à M. VINET, et reconnaissants des services qu’il leur avait rendus, ils lui voulaient témoigner leur estime en refusant catégoriquement de reconnaître tout autre instituteur, et qu’en conséquence ils préféraient garder leurs enfants chez eux ou les envoyer en classe dans les communes voisines, plutôt que de me les confier à moi, tant que je remplacerait M. VINET.Ils espéraient ainsi, disaient-ils, forcer l’administration à capituler et à leur rendre l’instituteur de leur choix. En vain je leur fis remarquer que j’étais loin d’avoir demandé le poste d’Eurre, mais qu’au contraire je ne venais l’occuper qu’à mon corps défendant. Ils le comprenaient très bien, aussi s’excusaient-ils, en très bons termes, d’une résistance qu’ils feraient à tout autre aussi bien qu’à moi, qu ‘en définitive cette résistance était une question de principe et non une question de personne.

Néanmoins et malgré tout, je dus ouvrir ma classe. Le premier jour, il me vint 23 élèves, sur les 75 que comptait l’école le jour où mon prédécesseur fut incarcéré à la Tour de Crest et je n’en eu pas davantage jusqu’aux vacances. Tous les autres enfants furent envoyés à Allex ou à Montoison ou au pensionnat BOUVIER de Crest. Aussi au lieu d’un traitement de 900 F. assuré que j’avais à Saint Agnan, y compris le secrétariat de la mairie, je fus réduit à un traitement dérisoire qui n’atteignait pas 500 F. ! et j’avais déjà 3 enfants ! Quelle rude épreuve ! Quelles furent tristes les réflexions auxquelles je dus me livrer en face de la situation de disgrâce dans laquelle je venais d’être jeté si soudainement ! »

Le maire d’Eurre, M. BARRET, tenait à assurer son secrétariat lui-même, ce qui privait Fabien DIDIER des ressources d’une fonction qui était très souvent confiée à l’instituteur… Il ne lui restait plus qu’à déployer au mieux ses qualités de pédagogue pour essayer de convaincre les parents d’envoyer à nouveau leurs enfants à l’école d’Eurre.

« C’est ainsi que ces six premiers mois passés à Eurre ont été peut-être les mois où j’ai le plus travaillé de ma vie. (…) Les vacances terminées, je rouvris ma classe avec l’intention bien arrêtée de travailler de manière à vaincre mais non à mourir. Le premier jour, outre mes 23 fidèles, il me rentre huit élèves nouveaux qui avaient fréquenté les «écoles de Crest et de Montoison pendant les six premiers mois de ma présence à Eurre. Je leur demandai avec quels camarades ils travaillaient précédemment. Selon leurs indications, ils furent placés dans les divisions respectives. Puis je fis faire diverses compositions pour procéder au classement des places. Ces devoirs terminés, je les recueillis pour en faire la correction.

A première vue, je compris que pour ne pas éveiller la susceptibilité des nouveaux élèves, ils serait prudent de confier cette correction aux élèves eux-mêmes sans distinction d’anciens et de nouveaux. Le travail fut laborieux, seulement il prouva clairement que les enfants qui avaient fréquenté d’autres écoles, ne pouvaient pas suivre les autres.  Ces derniers en jubilaient. A midi, je courus faire part de ces résultats à un ami qui me portait beaucoup d’intérêt.

- gardez vous, me dit-il, de dire quoi que ce soit de ce qui arrive, vos élèves fidèles parleront assez .

En effet, ce fut comme une traînée de poudre, le soir, dans chaque famille. Ces jeunes enfants criaient tout haut que ceux de leurs camarades qui étaient allés au dehors ne pourraient plus suivre avec ceux qui étaient restés à l’école d’Eurre. Le lendemain, ce fut au tour des mamans et des papas à redire la même chose, si bien qu’au bout de huit jours ma classe fut au complet puisque même les deux fils de M. VINET m’étaient revenus. Si ce résultat fut ma première satisfaction, il fut aussi pour moi un fort encouragement pour mieux faire encore. Je me mis au travail avec une nouvelle ferveur. »

Fabien DIDIER

Extraits des notes sur sa vie, écrites de sa main aux environ de 1889

Resté à Eurre de 1852 à 1854, par délibération du conseil municipal, Fabien DIDIER du instruire gratuitement 8 élèves nécessiteux dans l’année 1853/1854. A la rentrée de 1854, il est remplacé par l’instituteur Hyppolite RAMBAUD, âgé de 36 ans.  

 

 

 

 

 

 

 

 

Notre-Dame de la Paix

02/08/2010 23:57 par atouteurre

  • Notre-Dame de la Paix

    Notre-Dame de la Paix

    02/08/2010 23:57 par atouteurre

Le monument est de nouveau en place, prêt à affronter le temps... Ph : jean michel LEROUX - 2010